9  Résultats

9.1 Hôpital de jour

9.1.1 Introduction

La durée du séjour après une arthroplastie de la hanche a lentement diminué au cours des dernières décennies. Le développement de parcours de soins cliniques, l’optimisation des techniques chirurgicales, de l’anesthésie et de l’analgésie postopératoire, ainsi que la prise de conscience de l’importance d’une mobilisation précoce pour prévenir les complications jouent un rôle important à cet égard.

Depuis le 1er janvier 2023, une arthroplastie de la hanche avec une prothèse fémorale ou une arthroplastie de la hanche avec une prothèse totale figure sur la liste A de l’arrêté royal du 25/04/2002, ce qui permet de financer ce type de chirurgie par le biais d’une hospitalisation de jour.

Dans la rubrique ci-dessous, nous tentons de répondre aux questions de recherche suivantes :

Quelle est la qualité des soins lors de la pose d’une prothèse totale de hanche en hospitalisation de jour?

  • Quels sont les critères de sélection pour la pose d’une prothèse de hanche ?
  • Quels sont les obstacles à la pose d’une prothèse de hanche?
  • De quelle manière la continuité des soins est-elle assurée après la pose d’une prothèse de hanche?

9.1.2 Analyse de données

L’analyse de nos données ciblées révèle que les interventions pour prothèse de hanche ont eu lieu exceptionnellement en hospitalisation de jour en 2019. L’analyse des données couplées montre que 23 séjours avec intervention pour prothèse de hanche via l’hospitalisation de jour répondent aux critères de sélection de notre audit en 2019. Nous retrouvons cette activité dans cinq hôpitaux. Le nombre d’interventions pour prothèses de hanche via l’hospitalisation de jour a augmenté pour atteindre 45 séjours en 2020, répartis dans 11 hôpitaux. Selon les statistiques de l’OECD, en Belgique, la proportion d’opérations de remplacement de la hanche réalisées en hôpital de jour est passée de 0,1 % en 2019 à 0,2 % en 2021.

La Belgique suit ainsi la tendance de majoration du nombre d’interventions en hôpital de jour pour faire face à la charge accrue que la pandémie a fait peser sur le système de santé pendant la période du Coronavirus (Mitchell et al. 2023).

Dans la Figure 9.1 nous voyons qu’en 2020, plus d’hôpitaux ont réalisé certaines procédures de remplacement de la hanche via l’hôpital de jour qu’en 2019.

Figure 9.1: One day stay activities compared between hospitals.

Les indications pour lesquelles ces arthroplasties de la hanche ont été réalisées, sont présentées dans la Table 9.1 . La principale indication est l’arthrose.

Table 9.1: One day stay activities compared between hospitals.
diag_icd10_en 2019 2020
Unilateral primary osteoarthritis, right hip 13 25
Unilateral primary osteoarthritis, left hip 7 15
Idiopathic aseptic necrosis of left femur 1 2
Osteoarthritis of hip, unspecified 1 NA
Other osteonecrosis, left femur 1 2
Other osteonecrosis, right femur NA 1

9.1.3 Enquête en ligne et audit sur place

L’enquête en ligne nous indique que l’arthroplastie de la hanche peut être réalisée en hôpital de jour dans 17 hôpitaux. À cette fin, 10 hôpitaux disposent d’un parcours de soins spécifique et 9 d’entre eux assurent le suivi des réadmissions. Dans les 7 hôpitaux où il n’existe pas de parcours de soins spécifique, un seul suit le taux de réadmissions.

Quatre hôpitaux dans lesquels nous nous sommes rendus organisent des interventions de remplacement de la hanche en hospitalisation de jour. Les chirurgiens interrogés rapportent les critères de sélection que nous avons identifiés dans la littérature.

L’arthroplastie de la hanche est possible chez :

  • des patients plus jeunes, plus actifs, sans comorbidités (Jaibaji et al. 2020)
  • si les conditions sociales sont idéales (ne pas vivre seul, habiter à proximité de l’hôpital)
  • à la demande du patient (2 hôpitaux)
  • s’il est possible d’adapter l’anesthésie et le planning au bloc opératoire (le patient est, en effet, programmé tôt afin d’avoir une surveillance des complications possibles et d’être suffisamment mobile pour la sortie) (1 hôpital).

L’analyse de nos données confirme que les patients ayant bénéficié d’une arthroplastie de la hanche en hospitalisation de jour ont :

  • un degré de sévérité moindre (2/3 SOI 1 et 1/3 SOI 2)
  • un âge moyen significativement inférieur (54,3 ans en 2019 et 58,7 ans en 2020) à l’âge moyen de 71 ans observé pour l’ensemble des séjours du groupe APR-DRG 301 (Cellule Technique)

La proportion de patients masculins est plus importante en 2019 (17/23) qu’en 2020 (23/45). Enfin, on constate que ce type d’admission en 2019 concerne principalement des patients ayant une activité professionnelle (18/23). En 2020, cette tendance est moins claire (23/45).

La Figure 9.2 montre la répartition par âge des patients à l’admission.

Figure 9.2: Patient age at admission.

Lors de la visite sur place, nous avons pu approfondir la situation actuelle dans les hôpitaux visités.

Les hôpitaux où l’arthroplastie de la hanche est déjà pratiquée en hospitalisation de jour (4 hôpitaux (H)) ont prévu :

  • que le chirurgien ou le coordinateur infirmier contacte le patient le lendemain de l’opération (2 

    H)

  • que le médecin généraliste assure le suivi du patient et que la consultation de suivi avec le chirurgien soit programmée plus tôt que lors d’une arthroplastie de la hanche via une hospitalisation classique (1H)

  • pas encore d’accords structurés pour l’organisation des soins ambulatoires postopératoires (1 

    H).

Les hôpitaux qui ne pratiquent pas encore l’arthroplastie de la hanche en hospitalisation de jour (26H) rencontrent les obstacles suivants pour son déploiement :

  • nécessité d’un suivi médical adéquat à domicile (11H).
  • patients qui ne sont pas en demande, caractéristiques spécifiques du groupe cible et préoccupations concernant la situation du patient à domicile (par exemple, manque de compréhension de la nécessité ou non d’une intervention en raison d’une barrière de la langue, d’un réseau social limité et la présence éventuelle d’escaliers à domicile) (8H).
  • la crainte des réadmissions et une durée de séjour déjà raccourcie (4H).

Les hôpitaux notent également que l’importance de l’éducation préopératoire des patients s’accroît dans cette situation et que le suivi à domicile proposé par les hôpitaux est un aspect important pour réduire encore la durée du séjour et trouver un moyen de le financer.

Certains hôpitaux font référence aux projets pilotes sur l’hospitalisation à domicile. Pour raccourcir encore la durée du séjour, ils estiment qu’il est nécessaire de mettre en place des soins intégrés et de stimuler les soins transmuraux.

Grâce aux projets pilotes, depuis le 1er juillet 2023, certains patients peuvent recevoir à domicile des soins qui, jusqu’à présent, n’étaient possibles qu’à l’hôpital. Cette hospitalisation à domicile pour l’oncologie ou l’antibiothérapie se fait dans des conditions strictes et sous la supervision du médecin de l’hôpital. Elle permet aux patients de rester dans leur environnement familier pendant leur traitement. Les processus et les coûts de cette nouvelle organisation de soins seront évalués. L’INAMI étudie dans quelle mesure d’autres formes de traitement peuvent aussi y avoir leur place.

9.2 L’expérience patient

9.2.1 Introduction

Les mesures des résultats rapportés par les patients (Patient-Reported Outcome Measures-PROM’s) sont des outils de mesure complétés par les patients pour recueillir des informations sur les aspects de leur qualité de vie globale : notamment leurs symptômes, leur état fonctionnel, leur santé physique, mentale et sociale. Les PROM’s sont essentiels pour fournir des soins de santé centrés sur le patient et, s’ils sont utilisés en routine, ils peuvent améliorer la communication entre les patients et les prestataires de soins, contribuer à modifier les systèmes de soins de santé en fonction de l’appréciation qu’en ont les patients et améliorer l’expérience et les résultats des soins aux patients.

9.2.2 Situation en Europe

La mise en œuvre de programmes PROMS durables nécessite beaucoup de temps, d’efforts et d’argent. À l’heure actuelle, l’OECD souhaite se focaliser sur le comblement des lacunes critiques en matière d’information et sur l’élaboration de critères de référence internationaux pour les performances des systèmes de soins de santé telles qu’elles sont rapportées par les patients eux-mêmes.

Pour soutenir les décideurs politiques, les patients et les prestataires de soins de santé, l’OECD a mis en place l’initiative PaRIS. Il s’agit du projet Patient-Reported Indicator Surveys, dans lequel les pays collaborent pour développer, standardiser et implémenter une nouvelle génération d’indicateurs qui mesurent les résultats et les expériences en matière de soins de santé qui comptent le plus pour les patients

L’analyse de la littérature montre que pour les patients subissant une arthroplastie de la hanche, des questionnaires spécifiques ont été mis au point. l’Oxford Hip Score (OHS) en est un exemple. Ce questionnaire comprend 12 questions sur les activités de la vie quotidienne. L’OHS a été spécifiquement développé et validé pour évaluer la fonction et la douleur après une PTH. Si son utilisation est impossible en raison de contraintes locales, le Hip Disability and Osteoarthritis Outcome Score (HOOS) peut également être utilisé. Ces deux aspects sont abordés dans le rapport de l’OECD où le WOMAC a également été étudié.

Un autre outil de mesure est le score de hanche de Harris. Le “Harris Hip Score” (HHS) est une liste combinée composée d’un questionnaire et d’une liste d’observations. Cette liste peut être utilisée par les médecins pour évaluer l’état de santé et la satisfaction des patients souffrant de coxarthrose avant et après la pose d’une prothèse totale de la hanche. Un score élevé sur la grille HHS correspond à un bon état de santé, le patient ne ressentant que peu ou pas de douleur ou de raideur avec une articulation de la hanche qui fonctionne de manière optimale. L’analyse de la littérature montre que des questionnaires spécifiques ont été élaborés pour les patients subissant une arthroplastie de la hanche.

9.2.3 Situation en Belgique

Dans certains hôpitaux belges, le score de Harris pour la hanche est utilisé comme un outil de décision pour procéder à une arthroplastie de la hanche, et non comme un instrument d’évaluation des résultats postopératoires.

89 hôpitaux belges évaluent l’activité du patient après une arthroplastie de la hanche par le biais d’une note libre enregistrée dans le dossier du patient. Dans 30 hôpitaux, c’est le patient qui donne un score et dans 23 hôpitaux, c’est le médecin. La Figure 9.3 ci-dessous montre les réponses des hôpitaux.

Figure 9.3: Postoperative evaluation.

Outre l’utilisation des PROM’s, il existe également des questionnaires qui mesurent l’expérience des patients (Patient-Reported Experience Measures (PREM’s)) (Health Belgium).

Les patients doivent être impliqués en tant que partenaires actifs dans l’amélioration des soins. Les établissements de santé peuvent utiliser les commentaires des patients pour améliorer la qualité de leur prestation de soins. Le programme P4P 2019 évalue l’expérience des patients de deux manières : le degré de satisfaction du patient à l’égard de son séjour à l’hôpital et la mesure dans laquelle le patient recommanderait l’hôpital à sa famille et à ses amis. Il est important de mesurer l’expérience des patients et de se focaliser sur eux.

En Flandre, cette enquête est réalisée à l’aide du Flemish Patient Survey, un instrument développé par la Vlaams patiëntenplatform (VPP). Si les hôpitaux sont d’accord, les résultats sont publiés sur www.zorgkwaliteit.be, le site web de l’Institut flamand pour la qualité des soins (Vlaams Instituut voor Kwaliteit van Zorg(VIKZ)).

Il n’existe pas d’initiative similaire dans la partie francophone du pays. Les hôpitaux francophones peuvent collaborer avec Santhea, BSM-management ou la PAQS (Plateforme pour l’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité des patients) pour mesurer l’expérience et la satisfaction des patients. Pour les hôpitaux francophones de Wallonie et de Bruxelles, la PAQS, comme la VIKZ en Flandre, est un élément moteur de la politique de qualité hospitalière.

Pour P4P 2023, en collaboration avec le groupe d’experts “expérience des patients”, les critères ont été définis pour les services C et/ou D, les services de maternité, de gériatrie, de réadaptation et l’hôpital de jour. Les éléments évalués permettent de mesurer la satisfaction subjective des patients et le fait qu’ils soient centrés sur eux. De plus amples informations sur ces critères sont disponibles dans la fiche de cet indicateur.

Les soins centrés sur le patient sont une des six dimensions de la qualité telles qu’elles ont été formulées par l’Institute of Medicine. Le rapport de l’OECD intitulé “La qualité des soins de santé” indique que les patients devraient être impliqués en tant que partenaires actifs dans l’amélioration des soins.

Dans le cadre du programme Pay For Performance, aucun enregistrement supplémentaire ne sera demandé, mais les données relatives à l’expérience patient déjà collectées dans les hôpitaux généraux sont utilisées. VIKZ, Santhea, la direction de BSM et PAQS sont chargés de transmettre les résultats au SPF Santé publique.

Les données qui n’ont pas été collectées en collaboration avec l’une des organisations susmentionnées ne sont plus incluses dans l’ensemble actuel.

Les organisations utilisent des échelles différentes pour mesurer l’expérience et les soins centrés sur le patient. Le programme P4P a mis en place un système de notation spécifique afin de pouvoir comparer les résultats entre eux.

9.4 Mesures de la qualité

Nous avons inclus dans l’enquête en ligne des questions relatives à l’évaluation et au suivi de la qualité des soins au niveau du service. L’enquête porte sur le service d’orthopédie où les patients sont admis après une intervention pour prothèse de hanche.

Nous constatons dans la Figure 9.6 que la qualité des soins au niveau du service est abordée au niveau du patient lors des réunions de service et des discussions de cas de manière pro- ou rétrospectives. Lorsque l’on parle d’indicateurs spécifiques aux services, on fait souvent référence aux indicateurs qui sont étudiés à l’échelle de l’hôpital dans le cadre de l’enquête générale auprès des patients et dont les résultats sont ensuite transmis au service. La plupart des hôpitaux n’enregistrent pas le fonctionnement du service de manière à ce que ces chiffres puissent être comparés à la moyenne nationale telle que définie dans Orthopride. Ils utilisent rarement le rapport annuel Orthopride pour discuter de la qualité des soins au niveau du service.

Figure 9.6: Evaluation quality of care.

La discussion rétrospective des cas et les indicateurs spécifiques au service sont considérés comme les plus efficaces pour évaluer et améliorer la qualité Figure 9.7.

Figure 9.7: Most efficient form of evaluation quality of care.

Dans notre enquête en ligne, nous voulions également obtenir un aperçu sur le suivi des complications après une arthroplastie de la hanche. Il en ressort que dans la moitié des hôpitaux interrogés, les complications sont enregistrées et suivies au niveau du service. Dans 19 hôpitaux, seulement, le code d’identification unique de l’implant fait partie de cet enregistrement. Dans 58 hôpitaux, c’est le chirurgien implanteur qui enregistre ces données, assisté dans certains hôpitaux par la cellule qualité et/ou le chef du service d’orthopédie Figure 9.8.

Figure 9.8: Evaluation quality of care.

Dans 16 hôpitaux, les données sur la qualité des prestations ne sont pas utilisées pour un feed-back Figure 9.9. Dans les hôpitaux où ils utilisent ces données pour un feedback, il s’agit dans la plupart des cas d’un retour d’information au niveau du service et, dans une moindre mesure, au niveau individuel.

Figure 9.9: Evaluation quality of care feedback method.

Les résultats du domaine de l’expérience des patients sont communiqués de différentes manières :

  • via la plateforme informatique :
    • plateforme locale (3 hôpitaux)
    • utilisation d’une application (6 hôpitaux et en cours de développement dans 3 hôpitaux)
  • via le dossier du patient : 46 hôpitaux, dont 2 mentionnent l’utilisation du score de hanche de Harris
  • via la lettre de sortie : 4 hôpitaux
  • contact téléphonique postopératoire : 3 hôpitaux
  • par le biais d’enquêtes de satisfaction à l’échelle de l’hôpital : 53 hôpitaux
  • par aucun moyen : 5 hôpitaux (dont 1 hôpital développe une application et un autre hôpital développe PROM).
  • par le biais de cartes d’expérience

Les résultats des enquêtes sur l’expérience des patients ont déjà conduit aux actions suivantes :

  • actions préopératoires: meilleure information du patient, évaluation de la fragilité, parcours de soins pour le patient préopératoire, évaluation de la mobilité, ...: 21 hôpitaux
  • optimisation de la coopération avec les acteurs internes et externes: au sein du service d’orthopédie, avec les services sociaux, le service de gériatrie, les services de réadaptation externes, les médecins généralistes: 12 hôpitaux.
  • projets de qualité: 12 hôpitaux
  • parcours de soins : développement d’ERAS, ...: 15 hôpitaux, dont 4 ERAS
  • changements dans la prise en charge de la douleur: 15 hôpitaux
  • durée de séjour: réduction de la durée et transfert vers les services de réadaptation: 13 hôpitaux
  • mobilité: mobilisation plus rapide après l’opération: 12 hôpitaux, dont un App use mentionné
  • soins infirmiers: application de glace, orthèse de la hanche, ...: 5 hôpitaux
  • aucun: 21 hôpitaux, dont un a mentionné que c’était parce qu’ils travaillaient bien depuis longtemps.