5.3 Variabilité des prestations

Le nombre de prestations facturées continue d’augmenter de 2017 à 2019, tant pour les examens de CT et les examens d’IRM du groupe restant que pour les examens d’IRM du crâne et de la colonne vertébrale. Il existe une exception : un plateau semble avoir été atteint au niveau national en ce qui concerne les prestations de CT du crâne et de la colonne vertébrale. Ceci semble être dû à la stagnation du nombre d’examens CT en Région de Bruxelles-Capitale. Cependant, dans le protocole d’accord de 2014 relatif à l’imagerie médicale, des appareils d’IRM supplémentaires ont été mis à disposition à la condition qu’il y ait une réduction du nombre de prestations de CT crâne-colonne vertébrale de \(20\)% du volume des CT crâne-colonne vertébrale cette année-là.35 Cependant, nous observons que malgré une croissance démographique d’environ \(0.5\)% le nombre d’examens de CT augmente de \(2-3\)% et le nombre d’examens d’IRM de \(5-6\)%. Cela signifie que le nombre d’examens de CT et d’IRM a augmenté de \(7\)% de 2017 à 2019, soit de \(232.707\) examens (voir figure 4.1). Il y a une évolution positive : malgré le fait que le nombre total d’examens d’IRM et de CT augmente, le nombre d’examens CT crâne-colonne vertébrale semble avoir atteint un plateau.

Quand on regarde les pays environnants, on voit qu’en Allemagne à peu près le même nombre d’examens sont effectués par nombre d’habitants et que la moitié de ces examens sont des examens d’IRM. Les Pays-Bas effectuent environ la moitié du nombre d’examens d’imagerie médicale lourde par nombre d’habitants par rapport à la Belgique. Par rapport aux autres pays européens (UE25), nous voyons que la Belgique effectue plus d’examens d’IRM et plus d’examens de CT que la moyenne de l’UE25.36

L’explication de la variation entre les hôpitaux ne se trouve pas dans les caractéristiques des patients, comme il ressort des résultats de la modélisation statistique décrite dans la section 4.9. Nous avons vu dans cette analyse qu’un certain nombre de caractéristiques clés des patients (âge, sexe, organismes assureurs et statut social) n’expliquent pas réellement la variabilité entre les hôpitaux de manière substantielle. Nous voyons que le fait d’ajouter les régions au modèle explique environ la moitié de la variation. C’est aussi ce que l’on voit dans d’autres sections des résultats, à savoir qu’il existe une différence entre les régions qui n’apparaît pas de manière évidente à partir de la répartition géographique des caractéristiques des patients.

5.3.1 Répétition des prestations

Dans les résultats, nous voyons une variabilité entre les hôpitaux et entre les régions dans la proportion des répétitions dans les \(90\) jours. Cette variabilité dépend du type de répétitions : on observe plus de répétitions d’un même code de nomenclature en Wallonie et à Bruxelles, tandis que de telles répétitions sont davantage réalisées en Flandre lorsque le type d’appareil change.

Lorsque nous discutons des répétitions d’examens, nous sommes conscients qu’il existe plusieurs situations qui peuvent conduire à la répétition d’un examen d’imagerie médicale lourde. Il y a de bonnes raisons de répéter un examen. Par exemple, il est possible que dans le cadre de certaines pathologies (ex : hémorragie cérébrale) il soit nécessaire d’assurer un suivi à court terme en répétant l’imagerie. Un changement de type d’appareil peut être nécessaire car les informations des deux formes d’imagerie sont nécessaires pour obtenir un tableau clinique complet. Cependant, il existe également un certain nombre de choix qui peuvent rendre la répétition de l’examen indésirable, comme par exemple les répétitions dues à un jugement médical inadéquat, à l’application de techniques non conventionnelles, à l’indisponibilité des radiologues pour obtenir des conseils, aux mouvements (du patient), à un mauvais usage de l’appareillage, à une pratique désorganisée ou à une supervision inadéquate des étudiants. Nous ne pouvons pas faire cette distinction dans nos analyses et de ce fait, nous ne pouvons pas nous prononcer de manière contraignante à ce sujet. Nous mentionnons tout de même que la littérature recommande des pratiques de surveillance (procédures internes), avec entre autre le contrôle de la qualité, les techniques radiologiques, la formation, la supervision et le développement continu des professionnels.37

On voit qu’il existe des forfaits qui sont facturés plusieurs fois par patient et par jour, alors que selon la réglementation de la nomenclature, ceux-ci ne peuvent être facturés qu’une fois par jour. En ce qui concerne ces codes de nomenclature, il n’y a pas d’incertitudes ou d’ambiguïté sur l’interprétation des règles pour la facturation de ces forfaits. Compte tenu de la variabilité entre les hôpitaux, il n’y a pas de cause évidente à cela. La cause de ce problème sera examinée plus tard et les mesures nécessaires pour y remédier suivront. Lors de l’analyse de la double facturation des forfaits, nous avons rencontré dans un premier temps un nombre encore plus élevé de répétitions. Une analyse plus approfondie a révélé une erreur dans le processus de traitement des remboursements qui a entraîné la duplication de remboursements spécifiques dans les ensembles des données. En conséquence, plusieurs millions d’euros de prestations inexistantes ont été versés annuellement. L’audit a ainsi permis d’améliorer le système de traitement des remboursements, de sorte que les prestations en double (inexistantes) ne sont plus remboursées.

Autre aspect important pour éviter les répétitions inutiles : les examens précédents doivent être facilement accessibles et avec des informations de bonne qualité disponibles pour un médecin traitant. Un meilleur échange digital d’informations médicales des patients a été associé dans la littérature à une diminution des examens d’imagerie répétés, avec même des petites diminutions du nombre d’examens d’imagerie avancés répétés permettant ainsi des économies de coûts significatives.38 Nous voyons ici l’importance de la digitalisation ainsi que l’importance d’un accès aisé à l’information médicale pour les personnes impliquées dans le parcours de soins d’un patient.

Une digitalisation plus poussée rend disponible les informations qui peuvent être utilisées pour améliorer les décisions concernant l’imagerie. L’American College of Radiology (ACR) a publié des Appropriateness Criteria® avec des directives d’imagerie qui indiquent l’examen le plus approprié pour plusieurs affections cliniques, dans le but d’aider les radiologues à choisir un examen bien défini. C’est sur cette base que les systèmes d’aide à la décision clinique fonctionnent. Un tel logiciel est utilisé comme portier.39 L’autorisation préalable des demandes d’examens de CT et d’IRM entraîne une diminution substantielle de l’utilisation de ces modalités avec une réduction des coûts de l’imagerie.40


  1. Protocole d’accord relatif à l’imagerie médicale↩︎

  2. OECD iLibrary | Health at a Glance: Europe 2020: State of Health in the EU Cycle (https://www.oecd-ilibrary.org/fr/social-issues-migration-health/health-at-a-glance-europe-2020_82129230-en)↩︎

  3. James Nol , Godfrey Isouard and Jerzy Mirecki. Uncovering the causes of unnecessary repeated medical imaging examinations, or part of, in two hospital departments. Australian Institute of Radiography. The Radiographer 2005; 52 (3): 26–31↩︎

  4. Jung, H. Y., Vest, J. R., Unruh, M. A., Kern, L. M., Kaushal, R., & HITEC Investigators (2015). Use of Health Information Exchange and Repeat Imaging Costs. Journal of the American College of Radiology : JACR, 12(12 Pt B), 1364–1370. https://doi.org/10.1016/j.jacr.2015.09.010↩︎

  5. ACR Appropriateness Criteria® | American College of Radiology. Appropriateness Criteria (acr.org). https://acsearch.acr.org/list↩︎

  6. Blachar A, Tal S, Mandel A, Novikov I, Polliack G, Sosna J, Freedman Y, Copel L, Shemer J. Preauthorization of CT and MRI examinations: assessment of a managed care preauthorization program based on the ACR Appropriateness Criteria and the Royal College of Radiology guidelines. J Am Coll Radiol. 2006 Nov;3(11):851-9..↩︎