6.2 Recommandations

Ceci nous amène aux recommandations suivantes.

6.2.1 Cadastre

Ajuster le parc belge d’appareils médicaux lourds d’imagerie médicale aux besoins des soins de santé efficaces est un facteur qui permet d’augmenter la performance de l’imagerie médicale lourde. Pour ce faire, il est nécessaire de pouvoir faire un suivi correct des appareils. Le cadastre actuel est un pas dans la bonne direction pour pouvoir faire le suivi des appareils médicaux lourds d’imagerie médicale et a été utilisé lors des analyses. Les informations sur les appareils ont été reprises dans divers fichiers. Par exemple, à côté de l’enregistrement entre autre dans le cadastre, il existe également un enregistrement séparé des données de facturation. La qualité des données du cadastre pourrait être améliorée en développant davantage le cadastre en une application de base de données accessible aux services et gouvernements concernés. L’enregistrement pourrait ainsi en être facilité et l’input pourrait être vérifié plus facilement. Ces données pourraient être liées à d’autres sources de données afin que la vérification des autorisations et des agréments puisse se dérouler plus facilement. De ce fait, un cadastre plus étoffé, sous la forme d’une base de données interactive de qualité supérieure, peut permettre des analyses systématiques sur, entre autres, les paramètres de qualité des appareils et les paramètres de qualité de la facturation. Nous aimerions également voir l’utilisation étendue d’un numéro d’appareil unique pour un appareil médicale lourd d’imagerie médicale.

6.2.2 Profil de formation des prestataires en imagerie médicale

Les hôpitaux et les médecins ont la responsabilité de dispenser des soins de santé qualitatifs et de limiter l’exposition aux rayonnements ionisants. L’engagement de professionnels qualifiés y contribue. Il est nécessaire que le professionnel ait reçu une formation correcte et soit suffisamment recyclé. Il est bien connu qu’attirer des professionnels qualifiés est un défi en raison de la pénurie de technologues en imagerie médicale et d’infirmières spécialisées. Il existe actuellement des barrières dans le domaine de la formation qui peuvent être en partie surmontées en offrant une possibilité de formation en alternance ainsi qu’un programme de reconversion adapté pour les infirmiers en vue d’optimiser la durée de la formation. Pour les diplômes étrangers plus spécialisés, il existe des barrières à l’équivalence du titre professionnel. Il s’agit par exemple de diplômes étrangers focalisés sur un des trois éléments du stage de technologue en imagerie médicale. 51 Un agrément partiel à des conditions telles que se limiter à des activités décrites dans le contenu de tels diplômes pourraient lever cette barrière.

En termes d’incitants financiers, un ajustement de la classification semble indiqué pour promouvoir l’engagement des professionnels spécialisés. Pour un travail équivalent, une évolution salariale équitable doit être possible. Ceci devrait conduire à un terrain de jeu approprié au sein duquel, sur la base de critères objectifs, il y a une incitation à des soins de santé plus qualitatifs en encourageant à suivre une formation continue qui conduit à une expertise plus spécialisée et à l’amélioration de la qualité des soins de santé.

6.2.3 Transition du CT vers l’IRM

L’évolution vers une plus grande proportion d’examens d’IRM devrait être plus rapide compte tenu de l’exposition aux rayonnements que les examens de CT impliquent. Il est important à ce titre de souligner que l’objectif principal est de réduire le nombre d’examens de CT dans la mesure du possible. Il existe plusieurs points de départ possibles pour le management : limiter le nombre d’appareils et reguler le nombre d’examens.

Il est important de limiter le nombre d’appareils pour prévenir la surcapacité et des soins de santé supportés par l’offre. Dans les protocoles d’accord, il est fait usage d’un management basé sur les appareils d’IRM. Cependant, nous ne voyons pas l’effet souhaité de cette approche. Les nouveaux appareils d’IRM conduisent à plus d’examens d’IRM mais sans réduire le nombre d’examens de CT. Il est devenu évident que les protocoles d’accord précédents et le management pour agréer les nouveaux appareils d’IRM n’ont pas conduit à l’effet souhaité d’une baisse (relative) du nombre d’examens de CT. C’est en partie dû au fait qu’à ce jour, aucun choix n’a été fait dans les valeurs limites pour déterminer la distribution ultérieure de nouveaux appareils. D’après la variabilité de la proportion d’examens d’IRM entre les hôpitaux, il apparaît qu’il existe des possibilités de déterminer de telles valeurs limites sur une base relative. Ceci peut être fait, par exemple, en prenant les \(x\) hôpitaux ayant obtenu le score le plus bas ou les hôpitaux qui ont plus de \(y\) déviation standard en dessous de la moyenne ou de la médiane. La méthode précise à cet effet peut être élaborée en tenant compte des résultats de cet audit. Le management du nombre d’appareils de CT et l’enregistrement des appareils de CT pourraient prévenir la création de surcapacités indésirables.

Une intervention plus poussée, plus complexe, consiste à orienter la management vers le nombre de prestations et le rapport entre le nombre d’examens d’IRM et le nombre d’examens de CT au lieu de ou en complément avec le management du nombre d’appareils. Pour ce faire, il existe différentes possibilités, dont le développement sort du cadre de cet audit.

Outre la composition du parc d’appareils d’imagerie médicale, le comportement de prescription du médecin demandeur reste un facteur important dans le choix du type d’examen. La sensibilisation permanente des médecins internes et externes, éventuellement au moyen la formation continue, joue ici un rôle important. De plus, nous avons observé un effet statistiquement significatif d’un management adapté visant à réduire le ratio du nombre d’examens de CT sur le nombre d’examens d’IRM, dans lequel la part des examens de CT est plus basse. La prochaine étape est de travailler avec des systèmes d’aide à la décision clinique (clinical decision support system, CDSS) qui s’orientent vers la modalité d’imagerie la plus appropriée, en tenant compte de la liberté thérapeutique du prescripteur.

6.2.4 Digitalisation et systèmes d’aide à la décision clinique

Nous observons qu’il manque les informations nécessaires pour expliquer la variation de la réalisation des examens d’IRM vis-à-vis des examens de CT entre les hôpitaux. Afin de pouvoir recueillir et traiter des données qualitatives, tant pour les analyses de la qualité de l’imagerie que pour la mise en place de systèmes d’aide à la décision clinique, un parcours de soins entièrement digitalisé est indispensable. La digitalisation est une condition nécessaire pour un CDSS. Après tout, des informations précises et des données digitales de haute qualité sont une exigence de base pour un CDSS de haute qualité. En mettant à la disposition des professionnels des soins de santé, des patients et des administrations des soins de santé nécessaires des données sur l’ensemble du parcours de soins, il est possible d’analyser, d’ajuster et d’améliorer la qualité des soins de santé dispensés. Grâce à ces données, le médecin peut proposer au patient l’examen le plus approprié.

La digitalisation au sens large et plus spécifiquement du dossier du patient, sont des projets en cours depuis un certain temps. Cependant, il reste des points importants à travailler concernant, par exemple, l’échange de données entre les hôpitaux et les prestataires de soins externes. Ceci montre que la digitalisation englobe l’ensemble du trajet d’information relatif à la réalisation d’un examen d’imagerie médicale. Le trajet que nous décrivons ici peut être utilisé comme un soutien aux choix politiques en matière de digitalisation.

Cela commence par la prescription d’un examen d’imagerie médicale où un formulaire de demande digital peut être ajouté au dossier du patient informatisé (DPI). Lorsque le patient se présente à l’hôpital pour la réalisation de l’examen, le formulaire de demande peut être repris dans le DPI et être ainsi intégré au DPI de l’hôpital. Un CDSS et un DPI de qualité peuvent alors permettre au médecin spécialiste en radiodiagnostic en temps opportun de vérifier le formulaire de demande et d’appliquer la substitution si nécessaire. Après cela, l’examen est effectué. Les métadonnées (numéro d’appareil unique, exposition aux rayonnements ionisants…) de l’appareil de CT ou d’IRM sont couplées aux images qui sont réalisées et l’ensemble de ce paquet est ajouté au DPI du patient y compris le protocole. Ces données sont ensuite disponibles (digitalement) via les “hubs” pour les prestataires de soins ayant une relation thérapeutique avec le patient. Il est important que le système électronique soit configuré de manière à permettre l’intégration avec le propre logiciel, afin que les données soient échangées de manière standardisée. En utilisant des logiciels à code source ouvert pour harmoniser et standardiser les données, il est plus facile de les utiliser et aucune information n’est perdue car elle ne peut pas être utilisée dans les différents systèmes. Pour les différents services publiques, la connaissance de certaines informations telles que l’exposition aux rayonnements ionisants par examen est d’une grande importance afin de pouvoir surveiller les soins de santé et réaliser efficacement les examens d’imagerie médicale lourde. Il devrait être techniquement possible de s’assurer que chaque professionnel des soins de santé dispose des données pertinentes sur l’imagerie médicale afin de réduire au maximum la répétition des examens ou la perte d’informations. Ce qui a été mentionné précédemment conduit à une meilleure qualité de soins pour le patient. Il va sans dire que cela se fait en totale conformité avec la législation sur la vie privée et la protection des données, mais cette législation ne fait certainement pas obstacle à la poursuite de la digitalisation tant que l’implémentation technique est bien ancrée.

6.2.5 Médicaments radiopharmaceutiques

En raison des spécificités des produits radiopharmaceutiques, nous observons que la majorité des préparations radiopharmaceutiques magistrales ne sont pas conformes à la législation. En particulier, la majorité des précurseurs non radioactifs utilisés ne répondent pas aux exigences de l’arrêté royal du 19 décembre 1997 relatif aux matières premières pour les préparations pharmaceutiques et hors licence. De ce fait, la qualité de ces matières premières et des préparations radiopharmaceutiques n’est pas garantie. Cependant, il est reconnu qu’il est très difficile pour les producteurs de ce type de matières premières (en particulier les précurseurs non radioactifs) de commercialiser des produits conformes à cette législation. De plus, une attitude répressive de l’AFMPS à cet égard mettrait en péril la disponibilité des médicaments radiopharmaceutiques thérapeutiques et diagnostiques dans notre pays.

Il est donc recommandé à l’AFMPS de développer un cadre légal spécifique qui tienne compte des particularités des préparations des produits radiopharmaceutiques. Le niveau de qualité le plus élevé possible doit être recherché et garanti, dans le but ultime de garantir la sécurité des patients.


  1. étant “radiologie médicale (y compris la résonance magnétique); médecine nucléaire in vivo; radiothérapie, article 3, alinéa 1, 2° Arrêté royal du 22 décembre 2017 relatif au titre professionnel et aux conditions de qualification requises pour l’exercice de la profession de technologue en imagerie médicale et portant fixation de la liste des prestations techniques et de la liste des actes dont celui-ci peut être chargé par un médecin.↩︎