8  Transplantations rénales

Les transplantations rénales ne font pas partie du cœur de l’audit. Elles constituent cependant la référence en matière de traitement de l’insuffisance rénale chronique terminale. Nous allons donc nous y arrêter brièvement pour dresser un tableau général complet des modes de traitement. À l’avenir, les transplantations pourraient être amenées à jouer un rôle encore plus important qu’aujourd’hui (Rabb, Lee, et Parikh s. d.; Hernández et Caballero 2023).

8.1 Bilan pré-transplantation et inscription sur la liste d’attente

Motivation (ICP) : Les anciennes et les nouvelles directives KDIGO reflètent l’importance d’une évaluation rapide (et, pour les patients éligibles, d’un recrutement rapide) des candidats potentiels à la transplantation (Chadban et al. 2020; Stevens et al. 2024).

8.1.1 Quand le bilan pré-transplantation est-il effectué en vue d’une transplantation rénale ? (EL)

Figure 8.1: Quand le bilan pré-transplantation est-il effectué en vue d’une transplantation rénale ?

Constatation : Un peu plus de la moitié des centres de dialyse (54 %) ont indiqué qu’il était effectué à partir d’un DFGe < 20 ml/min. En termes de moment, c’était surtout au moment du début du trajet de prédialyse (27 %), mais aussi souvent du début de la dialyse (21 %). Il est frappant de noter que 17 % des hôpitaux ont indiqué des politiques différentes par néphrologue dans le même service. Le taux de réponse a été de 100 %. Sous « autres », les aspects suivants ont été mentionnés : “Cela varie d’un patient à l’autre en fonction de l’âge, de la néphropathie sous-jacente, de la vitesse de progression de la néphropathie, des comorbidités, de l’observance thérapeutique, etc. Nous ne le faisons qu’à partir d’un DFGe <15. La plupart des bilans sont commencés dès l’admission dans notre équipe de soins rénaux (trajet de prédialyse ou même plus tôt), cela dépend des comorbidités du patient (par exemple, si une coronarographie est nécessaire, on adopte une attitude attentiste jusqu’à la dialyse). Cela dépend du patient et du néphrologue (2x).”

Constatation : On trouve dans la directive KDIGO (avril 2024) “Practice Point 5.4.3: Consider planning for pre-emptive kidney transplantation and/or dialysis access in adults when the GFR is <15–20 ml/min per 1.73 m2 or risk of KRT is >40% over 2 years.” (Stevens et al. 2024). Les directives KDIGO précédentes mentionnaient :“1.1: We recommend that all patients with chronic kidney disease (CKD) G4-G5 (glomerular filtration rate < 30ml/min/1.73 m2 ) who are expected to reach end-stage kidney disease [ESKD]… be informed of, educated about, and considered for kidney transplantation regardless of socioeconomic status, sex, gender identity, or race/ethnicity (1D)” en ook; “1.1.1: Refer potential kidney transplant candidates for evaluation at least 6 to 12 months before anticipated dialysis initiation to facilitate identification/work-up of living donors and plan for possible pre-emptive transplantation (Not Graded)”. (Chadban et al. 2020). Une étude européenne récente mentionnait qu’on peut encore gagner du temps au niveau du « moment de l’inscription » sur la liste d’attente : “Our study shows that in most European countries, less than half of Living Donor kidney transplantations occur pre-emptively. One of the main hurdles, as brought up by registry representatives questioned within our study and confirmed in several studies, is the late referral of candidates to the transplant center and the long recipient work-up time.” (Kramer et al. 2024).

Remarque du panel d’experts : Aujourd’hui, l’orientation vers les centres de transplantation dépend principalement des différents critères utilisés par les centres de transplantation. L’orientation tardive par les soins primaires pose aussi parfois un problème. Étant donné que jusqu’à début 2024, l’organisation d’une évaluation multidisciplinaire à un DFGe <20 n’était pas remboursée, il n’est pas encore possible d’estimer l’effet de cette mise en œuvre.

8.1.2 Quel est le délai moyen (en mois) entre le début de la dialyse et le premier contact avec le centre de transplantation en vue de l’inscription du patient ? » (EL)

La majorité des centres ont contacté le centre de transplantation entre 3 (19 %) et 6 mois (40 %) après le début de la dialyse. La fourchette allait de 0 à 32 mois. Cinq centres n’ont pas répondu à cette question.

Constatation : C’est tard par rapport aux recommandations internationales. Celles-ci suggèrent de le faire 6 à 12 mois avant le début probable de la dialyse ((Chadban et al. 2020)). L’item suivant apporte un éclairage plus nuancé.

8.1.3 Quel est le pourcentage de patients déjà orientés vers un centre de transplantation avant le début de la dialyse ? (EL)

Les réponses à cette question ont donné une image très contrastée : dans 7 centres, ce taux est ≥ 50 %, tandis que dans 15 centres, il est inférieur ou égal à 5 %. La fourchette allait de 0 à 100 % Quatre centres n’ont pas répondu à cette question.

Constatation : Ces résultats doivent être replacés dans le contexte spécifique et considérés en fonction de la population du centre. Par exemple, le centre est-il situé dans un hôpital disposant d’un centre de transplantation ? Les centres doivent procéder à une évaluation individuelle pour déterminer s’ils peuvent améliorer leurs résultats et de quelle manière.

8.1.4 Quel était le nombre de nouveaux patients (incidence) âgés de moins de 75 ans en 2023 ? (EL)

En 2023, la majorité des centres ont vu entre 20 et 40 nouveaux patients (<75 ans). Cette année-là, sept centres ont vu ≤10 nouveaux patients (<75 ans). La fourchette allait de 5 à 87. Deux centres n’ont pas répondu à cette question.

8.1.5 Quel était le pourcentage de nouveaux patients de moins de 75 ans activement inscrits sur la liste d’attente d’une greffe au début de la dialyse en 2023 ? (EL)

Là encore, nous avons constaté des pourcentages très différents. La majorité des centres ont déclaré avoir ≤ 20 % de nouveaux patients de moins de 75 ans sur la liste d’attente active. Dix centres n’avaient aucun patient sur la liste d’attente active. La fourchette allait de 0 à 80 %. Trois centres n’ont pas répondu à cette question.

8.2 Aperçu des transplantations rénales

En Belgique, le nombre de patients vivant avec un rein greffé a augmenté de 5218 (en 2010) à 6686 (en 2018), mais il a diminué en 2019. Au début de la pandémie du COVID-19 en 2020, ce chiffre a encore baissé Microsoft Word - Rapport College 2020 - rapport national.docx. Il s’agit du dernier rapport du Collège de médecins pour le centre de traitement de l’insuffisance rénale chronique (arrêt des activités le 1/1/2022).

Constatation : Chez les moins de 65 ans, le nombre de patients ayant subi une transplantation rénale a dépassé le nombre de patients dialysés.

Constatation : Les transplantations nombreuses et rapides sont considérées comme l’étalon-or de l’insuffisance rénale. Elles ont également un impact potentiel sur le nombre de patients en dialyse péritonéale et sur la durée du traitement des patients en DP. Car, en effet, la DP constitue le traitement de premier choix avant la transplantation (Nardelli et al. 2022)

Ces bonnes nouvelles s’accompagnent d’une mise en garde importante, notamment en ce qui concerne le nombre relativement faible de donneurs vivants dans notre pays. Il s’agit d’un vaste réservoir d’organes potentiels qui est sous-utilisé dans notre pays, alors qu’il y a un nombre très important de patients (914 au 1/1/2020) sur la liste d’attente Microsoft Word - Rapport College 2020 - rapport national.docx. Le tableau suivant, tiré d’Eurotransplant, illustre ces petits nombres :

Figure 8.3: Bron: Eurotransplant - Statistics

Dans d’autres pays (en particulier l’Allemagne (D) et les Pays-Bas (NL)), l’accent est mis beaucoup plus fortement sur la sensibilisation et l’encouragement des donneurs vivants (voir la figure ci-dessous). https://www.kidney.org/news-stories/transplants-all-saving-lives-one-kidney-time of https://www.organdonation.nhs.uk/become-a-living-donor/ ou Nierdonatie bij leven - Nierstichting.

Si nous comparons les greffes de rein en Belgique à la moyenne européenne et mondiale par million d’habitants, nous obtenons l’image suivante.Global access to transplantation

Table 8.1: Transplant statistics (source: transplant observatory)
Type of Transplant # Belgium ppm Belgium # Europe ppm Europe # World ppm World
Actual deceased donors (DD) 342 29.23 10425 19.25 22586 6.03
Actual DD after brain death 192 16.41 6679 12.33 16938 4.52
Actual DD after circulatory death 150 12.82 2237 4.13 4139 1.11
Total kidney transplants 478 40.85 19684 36.34 51648 13.79
Deceased kidney transplants 423 36.15 15317 28.28 35433 9.46
Living kidney transplants 55 4.70 4367 8.06 16215 4.33

Constatation : La Belgique se porte bien en ce qui concerne les options de transplantation, avec un nombre nettement plus élevé de transplantations basées sur des donneurs d’organes décédés en Belgique (36,15 patients par million d’habitants) par rapport à l’Europe (28,28 p.p.m.). Il y a cependant encore une marge de progression car nous nous situons beaucoup plus bas que d’habitude en Europe en ce qui concerne les transplantations via des donneurs vivants : 4,7 p.p.m. contre 8,06. Cette piste nécessite des efforts de sensibilisation de la part des autorités et de la communauté médicale, en plus d’un soutien bien développé aux donneurs vivants (sur des aspects juridiques tels que l’obtention d’une assurance, de prêts et de crédits) et de la facilitation de la sélection des donneurs. Parallèlement, un financement a été accordé pour 4 campagnes de matching par an dans le cadre du « living donor exchange program » en Belgique.